ALBANT DENUIT

Les techniques de production et les modes d’exposition de la sculpture contemporaine relèvent parfois d’une logique normative comparable aux traditionnels canons artistiques. Il semble donc qu’une standardisation des modes de création a succédé à l’hégémonie du jugement de goût. Pour ces raisons, Alban Denuit analyse par son travail les logiques spécifiques aux processus de normalisation des espaces environnants, de la sculpture plus précisément.

 Né à Marmande en 1983, Alban Denuit suit l’enseignement de Giueseppe Penone au sein l’École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris. Il mène également un cursus au sein de l’Université Bordeaux Montaigne, ce qui le conduira à soutenir une thèse de doctorat intitulée Du canon artistique à la norme industrielle, une forme sculpturale au cœur du quotidien.

Déjà invité par la galerie Éponyme dans le cadre d’une exposition collective (Nos voisins sont tellement humains, 25 janvier – 28 mars 2015), l’artiste bénéficie, grâce à cette exposition personnelle, d’une présentation complète de son travail.

Si l’on en croit les souvenirs de Paul Gauguin, Paul Cezanne aurait déclaré « qu’un kilo de vert est plus vert qu’un demi kilo » (1). Avec Le poids des couleurs (2013) – ici réalisé en vert de cobalt – Alban Denuit rappelle que l’intensité est proportionnelle à la quantité de pigments. Il est donc question de « poids ». Aussi, l’addition progressive de dessins aux crayons confère à la couleur une dimension sculpturale. Quant à L’épaisseur du mur (2012 – 2015), elle imagine le chromatisme interne d’une paroi. Composée de briques de peinture industrielle déshydratée, cette œuvre révèle, par ses imperfections, le formatage de l’architecture contemporaine qu’elle infiltre. Selon la même logique, un travail plus ancien intitulé A3 (2008 – 2009) s’intéressait déjà à la standardisation des espaces bâtis. Entamé dans le cadre d’une résidence d’artiste en Chine, cet empilement de feuille matérialise les volumes supposés d’un plan d’architecte.

Le passage du plan au volume s’observe également dans le Diamètre d’une feuille (2011), une pièce dans laquelle l’enroulement du papier transforme le support en objet et la souplesse en rigidité. Le geste se transforme en matière lorsque l’artiste « sculpte » des traits de crayons avec les Mines de plomb (2014 – 2015).

À travers son langage artistique, Alban Denuit remet en jeu les outils et les techniques issus de l’industrie. Ainsi émerge une mise à distance des normes et des conventions de la sculpture comme de l’architecture.

François Trahais


ALBAN DENUIT
Du 25 Juin au 25 Juillet 2015


Si l’on en croit les souvenirs de Paul Gauguin, Paul Cezanne aurait déclaré « qu’un kilo de vert est plus vert qu’un demi kilo » (1). Avec Le poids des couleurs (2013) – ici réalisé en vert de cobalt – Alban Denuit rappelle que l’intensité est proportionnelle à la quantité de pigments. Il est donc question de « poids ». Aussi, l’addition progressive de dessins aux crayons confère à la couleur une dimension sculpturale.

Extrait de texte, François Trahais 2015

(1) Phrase attribuée à Paul Cezanne citée par Paul Gauguin dans Diverses choses, notes consignées entre 1896 et 1897, accompagnées d’aquarelles. Musée du Louvre, Paris, Département des arts graphiques.